L’équipe du GISCOPE 84 mène une enquête systématique auprès de patient·es atteint·es d’hémopathies malignes pris en charge dans les établissements du Groupement hospitalier de territoire du Vaucluse. Cette enquête produit des données précises sur les parcours et activités de travail des patient·es, les expositions à 64 cancérogènes classés qu’ils/elles ont pu subir dans le cadre de leur travail, ainsi que sur leurs parcours résidentiels. La production de connaissances sur les expositions aux cancérogènes permet d’identifier les populations les plus exposées et d’éclairer les facteurs institutionnels et sociaux qui conduisent à rendre visibles – ou à laisser dans l’ombre – les risques sanitaires liés au travail et à l’environnement.
Depuis 2017, 823 patient·es diagnostiqué·es dans le Vaucluse ont été inclus dans l’enquête permanente du GISCOPE 84. Cette enquête montre que près de 90 % des patient.es ont été – souvent lourdement – exposé.es aux cancérogènes dans leur travail (chiffres au 30/12/2023)
Un principe d’enquête permanente
L’enquête permanente s’appuie sur le recensement systématique des cas de lymphomes non Hodgkiniens et myélomes multiples diagnostiqués dans sept établissements de soin du Vaucluse, desservant un bassin de population trans-départements d’environ 600 000 habitants. À partir des cas incidents, des entretiens biographiques avec les patient·es permettent la reconstitution détaillée de leurs parcours professionnels, au plus près des activités réelles de travail, ainsi que de l’histoire résidentielle. Un collectif pluridisciplinaire d’expert·es des conditions et procédés de travail et des expositions toxiques (composé de médecins du travail, sociologues, ergo-toxicologues, ingénieurs de prévention, chimistes, patients experts, etc.) analyse les parcours professionnels et identifie et caractérise les possibles expositions à des cancérogènes classés (CIRC, directives européennes).
Des projets de recherche
Le dispositif du GISCOPE 84 s’articule autour de plusieurs projets de recherche adossés à l’analyse des données issues de l’enquête permanente :
- Connaître les expositions professionnelles aux cancérogènes pour prévenir les cancers hématologiques
- Identifier les activités réelles de travail exposant aux pesticides tout au long de la carrière (ACT-PEST)
- Sociologie des inégalités de genre face au cancer professionnel hématologique. Le cas des femmes travaillant dans le nettoyage
- Travail cancérogène et effets sociaux des cancers. Les inégalités devant les hémopathies malignes d’origine professionnelle comme enjeu de santé publique (TRACHES)
- Expositions professionnelles dans le secteur agricole et modalités du (non) recours au droit à la reconnaissance en maladie professionnelle – une étude à partir du cas des travailleurs saisonniers marocains en contrat OFII
- Hémopathies malignes d’origine professionnelle : des patient·es partenaires pour lutter contre l’isolement et pour l’accès aux droits
D’autres projets de recherche – sur les coûts des hémopathies d’origine professionnelle ou encore sur les liens entre expositions cancérogènes et devenir post-diagnostic des patient·es atteint·es d’hémopathies – sont en cours de construction.
Une composante interventionnelle
Pour chaque patient·e, le collectif d’expertise émet un avis sur l’opportunité (ou non) d’engager une déclaration en maladie professionnelle. Les patient·es éligibles, qui souhaitent s’engager dans la démarche de déclaration, sont accompagné·es par une assistante sociale hospitalière et une sociologue chargée du suivi tout au long de la procédure. La moitié d’entre elles/eux sont orienté·es vers une déclaration de maladie professionnelle. Depuis 2017, 36 patient·es accompagné·es par le GISCOPE 84 ont obtenu une reconnaissance en maladie professionnelle.